A 250 jours des élections municipales, il n’est pas inutile de revenir sur l’une des leçons des dernières élections législatives : la victoire de la gauche dans les grandes villes françaises (Lyon, Toulouse, Bordeaux…) et bien sûr dans la première d’entre elles, Paris.
Les larges victoires de la verte et discrète Martine Billard dans le Centre de Paris et de la socialiste Sandrine Mazetier dans le 12e arrondissement en sont les exemples les plus frappants.
Au-delà du couac de la Tva sociale et de la crainte d’un tsunami bleu, de nombreux observateurs ont pointé le rôle déterminant des électeurs « bobos ».
Depuis dix ans, on a tout dit sur les « bourgeois bohêmes ».
Tout a commencé avec un journaliste américain du New-York Times, David Brooks qui, en 2000, leur consacre un livre « Bobos in Paradise ». Pour qualifier le retour des catégories intellectuelles plus ou moins fortunées dans les centres villes américains, il décrit la spécificité de ces nouveaux arrivants : de jeunes adultes en phase avec le libéralisme économique, mais qui affichent des modes de vie très différents de ceux de la bourgeoisie traditionnelle.
A Paris, alors que la grande bourgeoisie a depuis longtemps fait le choix des arrondissements de l’Ouest, les bobos préfèrent la mixité sociale : ils investissement les quartiers vidés par la désindustrialisation et le départ des artisans et des classes populaires.
Les bobos vivent de leur travail, non pas de leur patrimoine et trouvent leur légitimité dans le mérite universitaire : ils s’intéressent aux thèmes des droits de l’homme, de l’écologie, à la liberté culturelle, sont favorables au PACS et à la parité.
Les sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon tracent leur portrait à travers les récentes évolutions de notre ville.
« Peu représentatif de l’ensemble national à cet égard, Paris concentre énormément de métiers artistiques, de la mode, du cinéma, de la presse. Or, les bobos sont justement nés du développement de secteurs économiques comme les nouvelles technologies, la grande distribution, l’enseignement ou les médias, qui ont produit une nouvelle élite, des actifs plus jeunes que la moyenne, des diplômés assez à l’aise dans des familles recomposées avec une idéologie libertaire, menant des modes de vie très différents de la bourgeoisie de l’Ouest. »
C’est ainsi qu’à Paris, les tendances ont été bouleversées en quelques années. Nous sommes passés d’une ville populaire à une ville bourgeoise. Rappelons que si, après guerre, la capitale comptait 65% d’ouvriers et d’employés pour 35% de cadres et de patrons, les proportions sont aujourd’hui inversées et Paris vote à gauche dans une majorité d’arrondissements.
Paris a changé. Nous avons - nous aussi - l’obligation de changer pour mieux comprendre et analyser les attentes des Parisiens qui vivent dans nos quartiers. Pour cela, il nous faut faire preuve d’un autre regard pour répondre à ceux qui placent le cadre de vie, l’environnement et l’aménagement durable au cœur de leurs préoccupations.
Le temps est venu de leur proposer un projet audacieux, de lancer des propositions novatrices, d’en débattre avec tous ceux qui veulent agir pour leur ville.
C’est à cet exercice que nous devons consacrer nos énergies.
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